Concert de Berlin du 7 février 1943

Ce programme fait partie d'une série, acquise par la SWF, de huit fascicules intéressant les saisons 1940/41 à 1942/43 de la Philharmonie de Berlin. Quelques précisions avant d'ouvrir chacun d'eux. On est en période de guerre et donc de restrictions, mais on reste étonné de la qualité des documents : couverture cartonnée, impression deux couleurs en couverture, présence d’au moins une photographie, analyse des œuvres... Et aucune référence au régime en place : on se croirait dans une monde sans croix gammée... Enfin, certains programmes comportent une rubrique « nouvelles des Philharmoniker », ou des annonces de programmes, qui nous permettent de suivre la vie de cet orchestre. On notera que le concert est donné trois fois, ce qui totalise plus de cinq mille auditeurs !


Un enregistrement nous est demeuré des deux pages de Sibelius inscrites au programme : L’exceptionnelle En Saga et la version — disons pas totalement aboutie — du Concerto pour violon. Georg Kulenkampff n’y apparaît pas au mieux de sa forme. Considéré comme un « grand » dans son pays, il n’est pas autant loué ailleurs, où, il est vrai, on peut lui opposer une concurrence redoutable.

Ce programme est l’occasion de rappeler un fait : l’Allemagne, en choisissant les options où l’engage sa politique à partir de 1933, va se priver d’un nombre considérable de grands solistes (on peut en dire autant des chanteurs).

Sans être exhaustifs, reprenons la liste des solistes de réputation internationale que Berlin pourra entendre durant les années de guerre.

Au piano, von Sauer décédé, il demeure quelques grandes pointures comme Kempff, Backhaus, Gieseking, Ney (très bien vue par le régime en place), Erdmann (très mal vu par les mêmes). Claudio Arrau, professeur à Berlin, quitte l’Europe pour une carrière américaine ; le suisse Edwin Fischer, lui, jouera à Berlin jusqu’au printemps 1943.

Il y a toujours eu plus de pianistes que de violonistes… mais, là, on peut parler de  pénurie. Kulenkampff joue les solos à tous les sens du terme ! À lui qui occupe tout le terrain, on ne peut guère opposer que l’américaine prodige Guila Bustabo (la pauvre ne réalise même pas sur quelle galère elle s’est embarquée en demeurant en Allemagne), et surtout les talents exceptionnels qui peuplent le pupitre de Konzertmeister du Philharmonique : Siegfried Borries, Erich Röhn, Gerhard Taschner. On ne s’étonnera donc pas de les voir figurer si souvent à l’affiche.

… Et il y a toujours eu moins de violoncellistes que de violonistes, du moins en Allemagne, qui sur ce point n’a d’ailleurs jamais pu rivaliser avec la prodigieuse et prolifique école française. Il y a certes le vétéran Paul Grümmer, le jeune Ludwig Hoelscher et l’italien Enrico Mainardi, mais ce n’est tout de même pas le grand niveau, et les chefs qui se succèdent au pupitre du Philharmonique préféreront bien souvent mettre en avant ceux qui occupent le premier pupitre de l’orchestre : Tibor de Machula ou Arthur Troester. Ils y gagnent !

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