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Décennie de programme : 1941-1950
Concert du 11 janvier 1942
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Concert du 13 février 1942 – Variations sur le thème d’un mécontent
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Concert de Berlin du 23 février 1948
Ce n’est pas n’importe quel concert que celui dont voici le facsimilé du programme. Il voit la création de l’imposante Deuxième Symphonie de Furtwängler sous la baguette du compositeur.
Il n’entre pas dans le cadre de cette brève présentation d’analyser une œuvre aussi complexe. Son caractère romantique et même tragique, son écriture qui emprunte son langage à Brahms, Bruckner et même Wagner, son orchestration touffue, tout concourt à éloigner de nous ce qui était déjà très « daté » à l’époque.
Contentons-nous de mettre en avant quelques points de détail.
Nous ignorons pourquoi cette création se tient à l’Admiral-Palast, en secteur soviétique, et non dans la salle devenue habituelle pour les Berliner : le Titania, en secteur américain.
Au denier moment, du moins le 23 — la feuille volante que nous avons placée en début de facsimilé — la 39e Symphonie de Mozart a laissé place au Concerto grosso en ré majeur de Haendel, sans doute moins chargé d’affect.
Pour deux saisons l’Orchestre Philharmonique de Berlin confia la couverture de ses programmes au peintre Ferry Ahrlé (1924-2018). Cela nous vaut un portrait stylisé de Furtwängler particulièrement réussi.
Concerts de novembre 1948 à Paris
La France — en l’occurrence Paris — fut le premier des pays qui avaient eu à souffrir de l’occupation allemande à accueillir Furtwängler après guerre. Dès janvier 1948, le chef se produisit avec le prestigieux et vénérable Orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire.
Depuis deux ans le chef titulaire en était André Cluytens, qui avait succédé à Charles Munch en 1946, la présidence appartenant de droit au directeur du Conservatoire supérieur, le compositeur Claude Delvincourt.
En novembre de la même année, Furtwängler revint pour une autre série de trois concerts, toujours au Théâtre des Champs Élysées — qui a pris la place de l’ancienne et historique salle du Conservatoire de la rue Bergère, dénoncée depuis des lustres comme trop exiguë et indigne d’une métropole comme Paris. Notons que ce concert vint quelque jours après le Requiem allemand de Stockholm.
Programme on ne peut plus classique. Rien à ajouter donc, sauf le nom du Premier violon solo de l’orchestre qui, sans doute, assura le grand solo dans la Quatrième de Schumann : Roland Charmy.
Un grand merci à l’adhérent qui nous a procuré ce programme.
Concert de Berlin des 20-22 décembre 1950
On ne compte pas les très nombreuses Neuvième de Beethoven que Furtwängler dirigea à Berlin de 1920 à 1942, notamment avec le Chœur de Bruno Kittel.
À partir de son retour, les Neuvième se multiplièrent à Vienne (4 séries), à Bayreuth (2), à Salzbourg, à Lucerne (2), en Italie… mais se firent bien rares à Berlin. Problème de salle ? Il est vrai que la scène du Titania était exigüe. Problème de chœur ? Celui de la Cathédrale Sainte-Edwige a fait les beaux soirs de nombreux concerts et a rempli son office dans de beaux enregistrements. En tout cas pas un problème de solistes. Ceux rassemblés pour cette série de concerts de décembre 1950 sont de tout premier ordre, même si le casting apparaît a priori un peu hétérogène.
Le fascicule est lui-même intéressant. En marge de la longue analyse de l’œuvre sous la plume de P.W. — comprenez Peter Wackernagel — on remarque trois publicités de majors du disque :
– en page 2 : Decca, qui a signé des grands noms de la baguette, y compris Furtwängler, mais lequel n’a alors commis qu’un disque sous ce label : celui de la 2e Symphonie de Brahms avec le Philharmonique de Londres,
– en page 8 : Deutsche Grammophon Gesellschaft ; publicité générale qui annonce surtout un catalogue à venir en disques longue durée, et pour qui Furtwängler gravera quelques disques un an plus tard,
– en page 11 : Electrola (du groupe EMI), qui n’évoque pas les disques publiés avec Furtwängler — qui pourtant se multiplient depuis 1947 —, mais une Neuvième de Columbia en 78t, sans citer chef et orchestre, qui se trouvent être… Herbert von Karajan et le Philharmonique de Vienne.
Enfin, pour les gourmands, signalons que les chocolats et pralines du “petit Maure” de Sarotti, du dos de couverture, existent toujours.
Concert de Londres du 22 mai 1950
Concert de Berlin du 30 novembre 1941
Ce programme fait partie d’une série, acquise par la SWF, de huit fascicules intéressant les saisons 1940/41 à 1942/43 de la Philharmonie de Berlin. Quelques précisions avant d’ouvrir chacun d’eux. On est en période de guerre et donc de restrictions, mais on reste étonné de la qualité des documents : couverture cartonnée, impression deux couleurs en couverture, présence d’au moins une photographie, analyse des œuvres… Et aucune référence au régime en place : on se croirait dans une monde sans croix gammée… Enfin, certains programmes comportent une rubrique « nouvelles des Philharmoniker », ou des annonces de programmes, qui nous permettent de suivre la vie de cet orchestre. On notera que le concert est donné trois fois, ce qui totalise plus de cinq mille auditeurs !
Que voilà un programme un peu atypique.
En l’ouvrant, les yeux tombent sur des sentences d’hommes célèbres sur Mozart ; et la page au verso nous présente un portrait — pastel de Tilgner, vers 1786, dixit la 4e de couverture (1) — de Wolfgang Amadeus. Pourquoi ? Novembre 1941 : nous entrons dans le calendrier « de l’avent » des hommages à Mozart pour le 150e anniversaire de sa disparition.
Est-ce pour cette raison que Furtwängler a inscrit une œuvre liée au maître de Salzbourg, de Max Reger, compositeur qu’il respecte et que sa baguette a bien servi ? De toutes les œuvres de Reger inscrites à son répertoire — avec notamment les Beethoven-Variationen —, Les Mozart-Variationen sont la page qui revient le plus fréquemment dans ses programmes. Curieusement, il ne dirigera plus une seule note de Reger après son retour en 1947. (Pour plus d’informations, nous renvoyons le lecteur à l’étude Furtwängler et Reger, disponible sur le site de la SWF.)
Il en va de même pour la Nouveau Monde de Dvorak. Notre chef l’a dirigée, mais pas aussi souvent que la popularité de l’œuvre pouvait l’inciter à le faire. C’est d’ailleurs la seule symphonie du Tchèque qu’il a fréquentée, à côté de rares exécutions des Concertos pour violoncelle ou pour violon. Et là encore, ce pourtant grand romantique disparaît de ses programmes après 1944.
Entre les deux œuvres, Furtwängler a offert une place de choix — pour le mettre en avant, et lui seul ! —, à un tout jeune musicien qu’il vient d’engager à la Philharmonie, au poste de Konzertmeister : Gerhard Taschner. Beau geste, qui n’est pas le fait de tous les grands chefs ! Saluons-le comme il se doit, et regrettons que ce violoniste prodige, mais au caractère difficile et à la psychologie instable, n’ait pas mené après-guerre la carrière qu’il aurait pu tracer. La biographie, forcément courte, du nouveau venu est esquissée en avant-dernière page. Parmi les maîtres cités comme formateurs de l’apprenti, la plume autocensurée du rédacteur a omis un nom qui sonnait bien mal alors : Bronislaw Huberman… Et ce que ne dit pas non plus le programme, c’est que ce jeune génie de 20 ans a fait l’objet d’une offre concurrente, et plus substantielle, pour le même poste à la Staatskapelle de Berlin, de la part de son chef, Herbert von Karajan.
Au dos du fascicule figurent les programmes à venir. Pour le 16 décembre, Furtwängler avait prévu de jouer, en le dirigeant du clavier, le 27e Concerto de Mozart. Finalement il opta pour la Sérénade « Gran Partita », avec treize de ses Philharmoniker.
(1). L’attribution à Tilgner est curieuse ! Viktor Tilgner (1844-1896) a certes rendu hommage à Mozart, mais par la célèbre sculpture du monument Mozart à Vienne.
Concert de Vienne, 13 février 1949
Certains voient en Pfitzner l’ultime maillon de la chaîne musicale remontant jusqu’à Bach. Lui-même, contempteur de l’évolution musicale au xxe siècle, se voyait ainsi, ultime rempart contre une barbarie venant de l’étranger — xénophobe absolu — ou de son propre « camp ». L’histoire a retenu l’homme entier, inflexible, acariâtre, bilieux, ennemi de tout et de tous, ayant même réussi à se mettre les nazis à dos… Quelques œuvres subsistent, en tout cas pas cette « Rose du jardin d’amour », son second opéra au livret impossible, à l’écriture musicale incongrue, qui n’a pas dépassé les frontières de son pays, lequel l’a d’ailleurs passablement oublié. Furtwängler, en dirigeant un extrait de cet ouvrage, agit-il par conviction artistique ou par piété quasi-filiale ?
En revanche, c’est bien par passion qu’il dirige la Cinquième de Bruckner, surtout depuis que l’édition Haas a révélé la véritable dimension de l’ouvrage, et notamment du Final. À ce propos, relevons dans le commentaire du programme une sorte de « fable » qui avait encore cours à l’époque. Dans la nomenclature de l’orchestre, le commentateur y ajoute le doublement des cuivres pour le Finale, doublement nullement prévu à l’origine, mais que la plupart des chefs ont adopté. À l’époque, ces supplémentaires étaient souvent placés plus haut, sur la tribune de l’orgue, et l’on faisait alors référence aux douze apôtres… Furtwängler suivit-il cette mode ? pas impossible, puisque dans un courrier, justement au Philarmonique de Vienne, il demande à ce que ces cuivres supplémentaires soient placés « dans » l’orchestre. En fait, il convient d’oublier cet aspect romantique : si l’on double les cuivres, c’est qu’ils sont tellement sollicités que les instrumentistes parviennent les lèvres trop fatiguées pour le Final et notamment son gigantesque choral conclusif.